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DE LA MEILLEURE SECTE, À THRASYBULE, xiv.

conséquent qu’il soit jugé aussi par l’expérience ; car ce qui arrive pour les autres cas doit arriver également dans celui qui se présente actuellement. Ainsi, quelqu’un raconte que la neige refroidit : pour que cette histoire soit jugée, il faut se servir des mêmes moyens dont l’historien s’est servi. Le dogmatique pourra donc juger une histoire d’après la cause ; car si quelqu’un raconte que chez un homme dont les vaisseaux étaient distendus et qui était alourdi, une hémorrhagie survenant a dissipé le malaise et la lourdeur, le dogmatique juge de la réalité de ce fait en se reportant à la cause qui produit les symptômes, et en examinant si l’hémorrhagie est capable de s’opposer à cette cause ; comme il trouve que la pesanteur et la distension viennent de la pléthore, et que l’hémorrhagie diminue cet état, il comprend que l’histoire est vraie, et il n’a pas besoin d’autre chose pour la juger. Dans le cas où on ne saisit pas la cause, c’est l’expérience même qui juge l’histoire. Par exemple, si on raconte que le pourpier dissipe l’agacement, on se sert de l’expérience pour juger le fait. Il est donc nécessaire que l’empirique juge aussi l’histoire par l’expérience ; mais si l’expérience juge l’histoire, l’histoire devient nécessairement superflue et inutile.

À cela quelques empiriques répondent : Nous jugeons l’histoire en faisant attention au degré de confiance qu’on doit avoir dans l’observateur. Si nous leur demandons alors comment ils jugent de ce degré de confiance, puisqu’on raconte tantôt des choses vraies, tantôt des choses fausses, dans un sens ou dans un autre, ils nous disent : Lorsque l’observateur ne raconte pas par passion de la gloire, ou par attachement à des dogmes, ou par amour de la controverse, alors nous tenons ce qu’il raconte pour vrai. On répliquera d’abord que l’observateur peut être trompé, sans qu’aucune des circonstances précédentes intervienne. Ce qu’il raconte est-il donc vrai, parce que lui n’a apporté ni passion de la gloire, ni attachement aux dogmes, ni amour de la controverse ? En second lieu, quand les empiriques se croient fondés à regarder l’observateur comme un médecin sage, renonçant à juger l’histoire, ils jugent la sagesse d’un homme ; un pareil jugement est du ressort des philosophes et non des médecins. D’ailleurs, par quel moyen décider qu’un observateur n’a été mû ni par la passion de la gloire, ni par l’attachement aux dogmes, ni par amour de la