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Page:Galien-Oeuvres anatomiques physiologiques et médicales-T2-1856.djvu/493

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GÉNÉRALITÉS SUR LE DIAGNOSTIC DES LIEUX AFFECTÉS.

sent une contusion comme une pierre, l’affection cessant aussitôt que le corps est écarté, sans que personne prétende pour cela que la partie n’a pas été affectée, parce qu’aucune trace de l’affection n’est restée. Avertis que nous emploierons toujours dans ce sens le terme affection et le mot être affecté, prêtez donc votre attention à nos paroles, en y cherchant un enseignement utile pour le pronostic et la thérapeutique. Tantôt, en effet, l’affection naît d’une certaine cause, mais elle n’a pas contracté une diathèse persistante, si la cause vient à être écartée ; tantôt l’affection est déjà formée et se forme encore ; souvent aussi elle cesse de se former (reste stationnaire), lorsque la cause disparaît ; mais la diathèse est déjà persistante. Ainsi, dans la dyssenterie, l’humeur mordicante est cause de l’affection, d’abord en grattant et en raclant l’intestin, et dans la suite en l’ulcérant. Si donc, avant d’avoir ulcéré l’intestin, l’humeur cesse de couler, l’affection n’est pas encore une dyssenterie. Mais si l’intestin était déjà ulcéré, l’affection existante ne cesserait pas avec le flux d’humeur, et je ne m’embarrasserais nullement, dans le cas actuel, de cette espèce d’argument agaçant, qui marche petit à petit, et qu’on appelle sorite[1]. Cette espèce d’arguments présente, en effet, dans maintes circonstances de la vie, des difficultés exposées ou démontrées par les philosophes ou médecins venus avant moi. Il est donc inutile pour moi de les citer quand j’ai, dans cette partie même de l’art, à marquer les doutes. En effet, que les affections se développent dans un certain temps, c’est un des points incontestés ; mais, de même que, dans le temps qu’elle s’élève, une maison n’est pas encore absolument maison, et que tout l’assemblage qui doit la constituer n’est qu’une maison naissante, de même pour chacune des maladies, dans le temps qu’elle se forme, faut-il dire qu’elle se forme, mais n’existe pas encore ? C’est là une question digne d’examen.

  1. Sans doute quelques médecins demandaient combien il fallait de gouttes d’humeur mordicante pour constituer la dyssenterie ; comme certains dialecticiens demandaient, en faisant une espèce de raisonnement appelé sorite, combien il fallait de grains de blé pour faire un tas ; si on répondait par exemple cent, ils demandaient si le chiffre quatre-vingt-dix-neuf formerait aussi un tas, et ainsi de suite. — Voy. Prantl, Geschichte der Logik ; t. I, p. 54.