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» Quoiqu’on croie généralement que Wali a été le premier à faire des vers dans cette langue[1], toutefois on voit par ses poésies mêmes qu’on en a écrit avant lui. À la vérité, on faisait, dans ce temps-là, les vers avec incurie et négligence. Mais la poésie urdue fut de jour en jour en progrès, et enfin Mir et Sauda la firent parvenir à la perfection. »

Avant cette dernière époque cependant, Hâtim dit, dans la préface de son Diwan zada, qu’il rédigea vers 1750 : « J’ai adopté, pour écrire, la langue de toutes les provinces de l’Inde, c’est-à-dire l’hindouï[2], qu’on appelle bhakha, parce qu’il est compris par le vulgaire et qu’il est en même temps, agréable aux gens distingués. » En effet, tout ce que dit Saïyid Ahmad n’est pas, à beaucoup près, d’une rigoureuse exactitude. On trouve rarement, il est vrai, cette qualité chez les Orientaux, qui ont trop d’imagination pour étudier une question sous toutes ses faces.

Saïyid Ahmad dit d’abord que depuis la conquête musulmane, en 1191, jusqu’en 1648, il ne s’introduisit aucun changement dans le langage des Indiens. Or, Mir Amman[3] dit au contraire : « Lorsque Akbar monta sur le trône (en 1556), il vint à sa cour des gens de toutes les Provinces, attirés par sa bonté, sa justice et sa libéralité. Quoiqu’ils eussent tous un langage différent, cependant ils entretenaient ensemble des relations de commerce et d’agré-

  1. C’est à cela que Mir fait allusion dans la préface de son Nikat usschu’ara, lorsqu’il dit : Rekhta az Dakhan ast « le rekhta tire son origine du Décan ».
  2. Ce mot est employé ici comme synonyme de hindi, signifiant la langue indienne en général. Proprement l’hindouï est l’ancien bhakha indien sans mélange d’arabe ni de persan, et écrit en caractères dévanagaris ; le hindi est le dialecte hindou plus moderne.
  3. Préface du Bag o Bahar.