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Page:Garneau - Histoire du Canada depuis sa découverte jusqu'à nos jours, tome IV, 1852.djvu/124

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HISTOIHE DU CANADA.

Russie allait commencer la décadence de Napoléon, assurer le triomphe final de l’Europe sur lui, et laisser l’Angleterre libre d’agir en Amérique. Depuis longtemps l’empereur français pressait les Américains de prendre les armes. Il savait que depuis leur révolution, ils convoitaient les provinces anglaises, qui le dos au nord pèsent sur eux de tout leur poids dans toute la largeur du continent. Mais ils mirent tant de lenteur à se décider, qu’il s’ébranlèrent au moment où leur gigantesque allié commençait à pencher vers sa ruine. Le vrai motif de la guerre était la conquête du Canada, le prétexte  : le principe que le pavillon couvre la marchandise et le droit de visite.

Ce prétexte subsiste encore. L’Angleterre fit une faute de ne pas le faire disparaître ; car sa faiblesse en Amérique augmente tous les jours proportionnellement avec la marche ascendante des États-Unis. Deux choses contribuent à cette faiblesse relative, l’inégalité numérique croissante de la population et surtout le vice fondamental du gouvernement colonial, dont le point d’appui est à 1000 lieues de distance, dans un autre monde, dans un autre monde qui a une organisation sociale et politique totalement différente, et dont la population devient de jour en jour plus étrangère d’idées et d’intérêts à la colonie. Aussi Alison avoue-t-il que le traité de Gand doit-être regardé plutôt comme une longue trêve que comme une pure pacification finale. La question de la frontière du Maine resta indécise avec la propriété d’un territoire aussi étendu que celui de l’Angleterre. Les États-Unis profitant du levain laissé dans l’esprit des colons canadiens à la suite des événemens de 1837, insistèrent pour qu’on en finisse une bonne fois, et obtinrent presque tout ce qu’ils demandaient par le traité d’Ashburton. Le droit de visite fera sans doute renaître les difficultés, car il est incompatible avec la dignité d’une nation libre, et encore moins avec les intérêts commerciaux des États-Unis dont les victoires à la fin de la guerre ont satisfait l’amour propre national et excité l’ambition future. Les triomphes de Plattsburgh et de la Nouvelle-Orléans ont fait oublier la bataille de Chateauguay et la retraite de l’armée américaine à la suite des combats perdus dans le Haut-Canada.

Le traité qui mit fin à la guerre de 1812 fut accueilli avec joie dans les deux Canadas, mais surtout dans le Haut, où la guerre