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Page:Garneau - Histoire du Canada depuis sa découverte jusqu'à nos jours, tome IV, 1852.djvu/18

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HISTOIRE DU CANADA.

enveloppait les premiers intérêts de la société. Il se flattait que dans la session suivante, elles régleraient les deux importans sujets sur lesquels il avait appelé leur attention, l’administration de la justice et la réorganisation de la milice pour la défense du pays en cas que la guerre ou les mauvaises dispositions des ennemis de toute espèce rendissent une défense nécessaire.

Les progrès de la révolution française qui attirait dans ce moment les regards de toutes les nations, et qui, comme un immense météore menaçait d’embraser l’Europe entière, remuait toutes les masses et remplissait tous les gouvernemens d’une terreur profonde. Les progrès de cette révolution dont l’influence avait puissamment contribué à déterminer l’Angleterre à nous accorder une extension de liberté, fixaient aussi les regards du Canada. Le peuple et le gouvernement regardaient ce spectacle avec des sentimens de crainte et d’étonnement. L’un offrait, l’autre demandait des témoignages de fidélité au roi et à l’ordre établi, tant on avait de méfiance les uns contre les autres, et tant l’on avait conséquemment besoin de se rassurer. L’on était réservé dans son langage et dans ses actes, et en réclamant l’usage de leur langue maternelle, les Canadiens protestaient sans cesse dans les termes les plus forts de leur attachement à la couronne. Cette retenue dans leurs discours et cette fermeté dans leurs principes assurèrent pour le moment deux avantages au pays, la paix intérieure et la conservation de ses droits. Le parti anglais abandonna ses prétentions outrées, soit qu’il vît l’inutilité de ses efforts, soit qu’il reçût des avertissemens en haut lieu, soit enfin qu’il résolût de se reposer sur l’avenir ; et tandis que l’ancien monde était en feu, le Canada jouissait de la liberté et de la paix, deux choses nouvelles pour lui. Tel était l’état des esprits lorsque lord Dorchester revint en Canada en 93 armé d’instructions nouvelles et fort amples, qui l’autorisaient à nommer un nouveau conseil exécutif, qu’il composa de 9 membres dont 4 Canadiens, et qui portaient que toutes les nominations aux charges publiques ne subsisteraient que durant le bon plaisir de la couronne ; que les terres ne seraient concédées qu’à ceux qui seraient capables de les établir, après qu’elles auraient été divisées en arrondissemens (townships), enfin qui permettaient aux séminaires de Québec et de Montréal ainsi qu’aux communautés