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Page:Garneau - Histoire du Canada depuis sa découverte jusqu'à nos jours, tome IV, 1852.djvu/267

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HISTOIRE DU CANADA

libertés populaires et de la cause canadienne : « Ces efforts que les vôtres, auraient déjà été couronnés de succès sans l’influence que les meneurs, l’intrigue, l’ignorance et la corruption ont exercée sur ceux qui avaient une prédisposition ou qui étaient les plus exposés… Avec de la constance et du courage nous détruirons un mal éphémère, nous démasquerons l’avilissement et la corruption de nos ennemis et de quelques ci-devant prétendus amis. »

M. Morin, malgré ce langage, était un homme doux, poli, d’un goût simple et studieux, ayant plutôt la suavité de manière d’un ecclésiastique, que l’ardeur emportée d’un conspirateur. On ne pouvait le charger d’un rôle qui fût plus contraire à son caractère. Ce qui faisait dire au Canadien ; « Ce fut pour lui un jour bien malheureux que celui où il se posa chef de parti dans ce district. Tant qu’il n’eut qu’à agir sous la direction immédiate de volontés supérieures, plus habituées que lui au commandement, il vit s’accroître sa réputation d’homme habile ; mais depuis il n’a fait que jouer de malheur, et prouver que s’il a les talens de l’exécution, il n’a pas encore acquis ceux de la direction. »

À St.-Denis, à St.-Charles, à St.-Eustache, à Berthier, à l’Acadie, on fit les mêmes préparatifs, malgré l’apathie de la masse de la population, qui n’était nullement disposée à prendre les armes pour renverser le gouvernement de vive force. Ces têtes exaltées de Montréal résolurent de s’adresser au congrès des États-Unis pour demander le commerce libre. Petit à petit l’on augmentait ainsi de hardiesse jusqu’à ce que l’on commençât à inquiéter les hommes paisibles, qui crurent devoir faire des démonstrations en sens contraire. Le colonel de Hertel, qui commandait un bataillon de milice de 1500 hommes dans le comté des Deux-Montagnes même, ce centre d’agitation, écrivait au gouvernement que ses soldats étaient pleins de loyauté et prêts à obéir à ses ordres au premier appel qui serait fait. Mais le grand nombre ne voyant pas de danger réel, désirait laisser le gouvernement se retirer comme il pourrait de ces difficultés. Car c’est lui qui en était la cause en voulant maintenir un ordre de chose plein d’injustices et de distinctions nationales. Mais lorsqu’ils virent le danger devenir réel et la résistance ouverte à St.-Denis et à St.-Charles, ils sortirent de leur neutralité pour appuyer le