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Page:Garneau - Histoire du Canada depuis sa découverte jusqu'à nos jours, tome IV, 1852.djvu/313

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HISTOIRE DU CANADA

de ne marcher en avant que graduellement, et non pas de s’élancer comme une cavale sauvage dans le désert. La conséquence, disons-nous, c’est que la république des États-Unis est devenue grande, puissante et un exemple pour le monde.

Les Canadiens sont aujourd’hui un peuple de cultivateurs dans un climat rude et sévère. Il n’a point en cette qualité les manières élégantes et fastueuses des populations méridionales, et ce langage qui semble sortir de cette nature légère et intarissable qu’on ne connaît point dans les hautes latitudes de notre globe. Mais il a de la gravité, du caractère et de la persévérance. Il l’a montré depuis qu’il est en Amérique, et nous sommes convaincus que ceux qui liront son histoire avec justice et bonne foi, avoueront qu’il s’est montré digne des deux grandes nations aux destinées desquelles son sort s’est trouvé ou se trouve encore lié.

Au reste, il n’aurait pu être autrement sans démentir son origine. Normand, Breton, Tourangeau, Poitevin, il descend de cette noble race qui marchait à la suite de Guillaume le conquérant, et dont l’esprit enraciné ensuite en Angleterre, a fait de cette petite île une des premières nations du monde ; il vient de cette France qui marche à la tête de la civilisation européenne depuis la chute de l’empire romain, et qui dans la bonne comme dans la mauvaise fortune, se fait toujours respecter ; qui sous ses Charlemagne comme sous ses Napoléon ose appeler toutes les nations coalisées dans des combats de géans ; il vient surtout de cette vendée normande, bretonne, angevine dont le monde respectera toujours le dévouement sans bornes pour les objets de ses sympathies royales et religieuses, et dont le courage admirable couvrira éternellement de gloire le drapeau qu’il avait levé au milieu de la révolution française.

Que les Canadiens soient fidèles à eux-mêmes ; qu’ils soient sages et persévérans, qu’ils ne se laissent point emporter par le brillant des nouveautés sociales ou politiques. Ils ne sont pas assez forts pour se donner carrière sur ce point. C’est aux grands peuples à essayer les nouvelles théories. Ils peuvent se donner des libertés dans leurs orbites assez spacieuses. Pour nous, une partie de notre force vient de nos traditions ; ne nous en éloignons ou ne les changeons que graduellement. Nous trouverons dans l’histoire de notre métropole, dans l’histoire de l’An-