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Page:Garneau - Histoire du Canada depuis sa découverte jusqu'à nos jours, tome IV, 1852.djvu/73

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HISTOIRE DU CANADA.

gouvernement a laissé mes prédécesseurs depuis la conquête diriger leur église en toute liberté. Ils ont trouvé dans cette conduite un motif de plus de se montrer zélés pour les intérêts de l’Angleterre. J’ai suivi en cela leurs traces. Pour m’être prononcé hautement de vive voix et par écrit dans le même sens, je me suis mis à dos une partie de mes compatriotes. Le gouvernement est juste ; s’il veut maltraiter les évêques de ce pays, j’espère qu’il ne commencera pas par moi… Les préjugés de l’Angleterre, observait-il encore, contre les catholiques se dissipaient, elle s’était adoucie contre les siens et ceux d’Irlande ; que de choses défendues par les statuts d’Edouard VI, d’Elizabeth et de quelques règnes suivans, et qui se font maintenant en toute liberté. Que n’a-t-on pas dit dans les deux chambres du parlement en 1805, en faveur des catholiques d’Irlande lorsqu’on y agita leur émancipation ?… aurait-on osé parler avec cette force et cette hardiesse il y a 100 ans ? Quant à la suprématie spirituelle, je veux dire à la qualité de chef de l’église qu’il a plu au parlement d’Angleterre d’attribuer au roi, il est très certain qu’aucun membre de l’église catholique ne la peut admettre.

Nous ne reconnaissons point l’église catholique, dit en terminant l’entrevue le gouverneur, aux yeux duquel la nomination aux cures était un moyen puissant de saper la foi du peuple, et d’amener insensiblement son apostasie en choisissant ses pasteurs. Mais le siècle n’était pas propre au succès d’une pareille œuvre. Loin de chercher à implanter une nouvelle foi, les gouvernemens ont assez à faire pour maintenir l’ancienne, outre qu’il y a plus qu’il ne faut d’autres germes de révolution pour les occuper.

C’est peu de jours après que sir James Craig déposa les rênes du pouvoir et partit pour l’Europe. Le peuple désigne le temps de son administration du règne de la terreur. Cette appellation contient plus d’ironie que de vérité. Il ne fit point répandre de sang, et dans ses emportemens il ne fut que l’instrument de son conseil, qui sut l’aveugler et le mener suivant ses vues lorsqu’il croyait avoir dans les membres de ce corps des serviteurs obséquieux et obéissans. Dans le discours étrange qu’il prononça en prorogeant les chambres, après tout ce qui s’était passé, il approuva complètement l’assemblée sur la question des