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HISTOIRE DU CANADA.

la robe, les tribunaux, la noblesse, tout parlait français en Angleterre ; que c’était la langue maternelle de Richard cœur-de-lion, du Prince noir et même de Henri v ; que tous ces personnages illustres étaient de bons Anglais ; qu’ils élevèrent avec leurs arbalétriers bretons et leurs chevaliers de Guyenne la gloire de l’Angleterre à un point où les rois de la langue saxonne n’avaient jamais pu la faire parvenir ;[1] enfin que c’était la langue de la grande Charte, et que l’origine de la grandeur présente de l’empire était due à ces héros et aux barons normands qui l’avaient signée et dont les opinions avaient toujours conservé la plus grande influence sur le pays.

La discussion se termina après une lutte vigoureuse par l’élection de M. Panet au fauteuil présidentiel, et la défaite de ses trois concurrens ; mais pas un seul anglais ne vota pour lui, tandis que deux Canadiens votèrent contre. La division fut de 28 contre 18.

L’élément anglais malgré sa faiblesse cherchait à dominer sous le prestige de l’influence métropolitaine. Le premier président élu, sans être un homme de talens supérieurs, avait l’expérience des affaires comme l’avocat le plus employé de son temps, une abondance d’élocution qui ne tarissait point, l’esprit orné et les manières faciles et polies de la bonne société. Le 20, le gouverneur approuva le choix de l’assemblée et adressa aux deux chambres réunies un discours dans lequel il recommanda l’harmonie et l’adoption des mesures que pouvaient demander l’avantage et la prospérité du pays. « Dans un jour comme celui-ci, dit-il, remarquable par le commencement d’une forme de gouvernement qui a porté la Grande-Bretagne au plus haut degré d’élévation, il est impossible de ne pas éprouver une émotion profonde, et que cette émotion ne soit pas partagée par tous ceux qui sont en état d’apprécier la grandeur du bienfait qui vient d’être conféré au Canada. Je me contenterai de suggérer qu’après avoir rendu des actions de grâces à l’arbitre de l’univers, nous rendions hommage à la magnanimité du roi et du parlement auxquels nous le devons en leur exprimant tous nos remercimens et toute notre reconnaissance. »

  1. On sait que les deux tiers de l’armée du Prince noir à la bataille de Poitiers étaient composés de Gascons, de Français.