Page:Garneray - Voyages (Lebègue 1851).djvu/216

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Quant au costume de ce ridicule personnage, il dépassait les bornes du possible. Par-dessus la première pagne qui lui servait de jupon, et par-dessous la seconde, qu’il drapait en guise de manteau, se voyait un vieil habit de soie rayée noir et lilas, bordé d’effilés, taillé à la Louis XV et constellé de larges boutons à médaillons ; cet habit, qui devait être toute une histoire, me parut un poème ! Sur la tête du géant se pavanait un tricorne déformé, il est vrai, mais surmonté, en compensation, d’un plumet haut de trois pieds ! Quant à ses jambes, complètement nues, elles étaient battues par un fourreau renfermant une vieille épée ridicule, défroque probable de quelque acteur de province, qui soulevait sans cesse les basques de son habit de la façon la plus drolatique que l’on puisse imaginer.

Enfin, suprême raffinement de luxe, des éperons énormes en cuivre, qui dataient au moins du temps de Ferdinand et d’Isabelle, étaient attachés comme des ergots à ses pieds nus. C’était à ne pouvoir le regarder en face sans éclater de rire.

Il s’approche du capitaine Cousinerie en faisant résonner ses éperons, puis pliant jusqu’à deux pieds du pont son épine dorsale :

— Capitaine, lui dit-il en assez bon français que je demanderai au lecteur la permission de ne pas transcrire ici textuellement, vous voyez en moi un noble portugais. Je me nomme Carvalho.

Quelque peu intelligible que fût le français du noble portugais, nous n’en fûmes pas moins ravis de l’entendre ; car il suffisait, et au-delà, pour nous servir à communiquer avec les Malgaches ou habitants de Madagascar.

Sa seigneurie Carvalho, désignant alors par un geste respectueux l’homme qui l’accompagnait, s’inclina de