Page:Garneray - Voyages (Lebègue 1851).djvu/27

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Une heure après cette capture, mon cousin Beaulieu me fit appeler près de lui.

— Louis, me dit-il, pour devenir un bon marin il faut non pas seulement naviguer beaucoup, mais aussi changer sou­vent de navire : j’ai donc décidé que tu passeras sur la prise. Cette occasion de t’instruire est d’autant plus favorable pour toi que vous serez peu de monde à bord, et que par conséquent tu te trouveras forcé de faire un peu de tout.

— Merci, capitaine. Me serait-il permis de vous faire une demande ?

— Accordé, si elle est juste et raisonnable.

— Je serais bien heureux de pouvoir emmener mon matelot Kernau avec moi.

— J’y consens volontiers.

Grande fut ma joie en apprenant que l’enseigne de la Bretonnière était désigné par le contre-amiral pour être capitaine de la prise. En effet, cet officier, qui, depuis que j’avais eu l’honneur de dîner avec lui chez mon cousin à Rochefort, s’était toujours montré excellent pour moi, possédait la nature la plus sympathique que j’ai jamais rencontrée. D’une modestie que rien n’égalait, si ce n’est son courage, qui était sans bornes, il avait de vraies manières de grand seigneur, ce qui ne l’empêchait pas de déployer en toute occasion une excessive aménité et une bienveillance soutenue.

Ce fut à lui que je dus, pendant le temps que je restai à bord de l’Elcinger, mes premières et plus précieuses leçons de l’art maritime. Notre prise, vers la fin de l’année 1797, arrivait sans encombre à l’île de France.

À l’île de France, notre division s’augmenta de deux frégates, la Cybèle, capitaine Tréhouard, et la Prudente, capitaine Magon Ces deux navires croisaient depuis plus de vingt mois dans les mers de l’Inde.