Page:Garneray - Voyages (Lebègue 1851).djvu/333

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quand ils ont pour eux une belle apparence et qu’ils sont commandés par des capitaines au fait de leur métier, essayer d’effrayer ceux qui les chassent en feignant de désirer eux-mêmes le combat ! Encore un peu de patience, voilà que nous approchons ce farceur-là à vue d’œil ! Je ne sais, mais j’ai l’idée qu’il y a de la fanfaronnade et de la ruse dans tout cela !

Surcouf, pénétré de cette idée, dirige de telle façon la marche de la Confiance, que nous nous trouvons à la fin forcés de passer au vent de l’ennemi. Nous risquons donc, si notre commandant s’est trompé, de recevoir, à brûle-pourpoint, une bordée qui peut nous causer des avaries majeures et nous mettre à la merci de l’ennemi ; puis, enfin, en passant sous le vent à lui nous courons le danger d’être abordés.

— Messieurs, nous dit Surcouf qui connaît trop quelle est sa supériorité pour craindre d’avouer son erreur, j’ai commis une grosse faute ! J’aurais dû laisser arriver d’abord et chasser ensuite sous différentes allures pour m’assurer de la force et de la marche de l’Anglais !

Notre capitaine se frappe alors le front avec violence, rejette loin de lui son cigare ; puis reprenant tout de suite son sang-froid :

— C’est une leçon, répond-il tranquillement. J’en profiterai.

Surcouf, retiré sur la poupe, interroge avec soin un gros registre sur lequel sont crayonnés des dessins de navire ; au bas de chaque dessin se voient plusieurs lignes d’écriture.

— Parbleu, messieurs, nous dit-il tout à coup, voilà mes doutes éclaircis. Vous êtes des officiers de corsaire et non des enfants, à quoi bon vous cacher ma découverte ? Remarquez bien l’Anglais : il a un buste pour figure,