Page:Garnir - À la Boule plate.djvu/194

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que parler de ces choses si vilaines était une honte pour elle tout autant que pour Odon. Et, même avec Mme  Cécile qui, débordante d’embonpoint et de bonté, passait avec elle une partie de ses journées, jamais il n’était fait aucune allusion.

La fuite d’Odon, tout de suite apprise et commentée, avait causé à la Boule Plate une stupéfaction indignée, qui s’était bientôt résolue en une commisération véritable, tant étaient vives les sympathies qu’Odon avait su grouper autour de lui. On invectivait Jane Reclary — les femmes surtout, les femmes longtemps dépitées et humiliées par l’intrusion à la Boule Plate de ses toilettes, de son chic, de sa réputation, les femmes longtemps vexées par son affectation à les ignorer, à trôner comme une usurpatrice dans les amicales réunions dont sa présence avait dénaturé le caractère. Les hommes secouaient la tête : « Était-ce croyable qu’une particulière pût faire tourner si complètement un homme « à sot » ? » Et chacun racontait des histoires, plus saisissantes les unes que les autres, pour démontrer combien notre nature est infirme, et fragile le respect de nous-mêmes, combien les plus braves gens sont à la merci des mauvaises femmes qui passent, des créatures qui vous détraquent d’un coup d’œil, vous affolent d’une