Page:Garnir - À la Boule plate.djvu/260

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lées n’ont pas l’air de peser sur l’oreiller qui leur sert d’appui. Ses yeux seuls semblent vivre encore, luisant dans la fosse noire de l’arcade des sourcils ; mais ils pâlissent à de certains moments, parfois noyés de grosses larmes ; il n’y a plus qu’à attendre qu’ils s’éteignent dans le néant.

La pluie noie Bruxelles, coiffe la ville d’une vague énorme, s’abat avec un bruit de flot déferlant, clapote dans les bassins du canal, inonde les vitres de jets forcenés, croule en cascades sur les toits ; tout est ruisselant et brumeux ; il fait humide et froid dans la maison entière.

Julien dit à Cécile : « Ne me laissez pas seul, maman…, j’ai trop peur. »

Elle a compris. Elle fait quérir Charles et Rose.

En les voyant entrer, les yeux de Julien ont un sourire de joie. Puis, quand Charles et Rose se sont approchés, il prononce, très bas :

— Mon Dieu…, laissez moi vous regarder… C’est la dernière fois que je vous regarde…, bientôt je ne vous regarderai plus jamais…, je ne serai plus rien…, plus rien.

Alors, il leur fait signe de se pencher tout près de lui, encore plus près, pour qu’ils entendent bien ce qu’il a à leur dire et qu’il ne se fatigue pas trop. Sa respiration est rapide et faible. C’est d’une voix