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Page:Gaskell - Autour du sofa.djvu/270

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AUTOUR DU SOFA.

relevé de son incapacité civile, et, pour sa femme et pour lui, la permission de s’asseoir dans la tribune de l’église. Cette demande ayant d’abord été refusée, Étienne Arnaud soutint ses droits avec vigueur contre le bailli de Labourd, magistral du canton. Sur ces entrefaites, les habitants de Biarritz se réunirent le 8 mai, au nombre de cent cinquante, pour approuver la conduite du bailli, terminèrent la séance par une souscription destinée à couvrir les frais de justice, et donnèrent pleins pouvoirs à leurs procureurs pour défendre la cause des gens de race pure contre Étienne Arnaud, cet étranger qui, en raison de son mariage avec une fille cagote, devait être, comme elle, expulsé du sanctuaire. Ce procès fut porté successivement devant toutes les cours de la province, et finit par un arrêt du parlement de Paris, qui donna tort aux superstitions basques, et autorisa Étienne Arnaud et sa femme à se placer désormais dans la tribune de l’église.

Cette décision ne fit qu’augmenter la colère des habitants de Biarritz, et en 1722, un charpentier appelé Miguel Legaret, soupçonné d’avoir du sang cagot dans les veines, s’étant placé dans la nef, parmi la foule des assistants, fut traîné hors de l’église par le prêtre et deux jurats de la paroisse. Legaret se défendit contre cet acte de violence au moyen de son couteau, et fut pour cette cause appelé devant le tribunal du ressort ; mais le prêtre et ses deux complices furent condamnés à faire amende honorable publiquement et à genoux à la porte de l’église, à la sortie de la grand’messe. Ils en appelèrent au parlement de Bordeaux, qui confirma la sentence, et Legaret put à l’avenir prendre à l’église la place qui lui convenait.

Après ces deux affaires, il parut accepté à Biarritz que tous les cagots jouissaient, leur vie durant, des mêmes droits que les autres gens du pays ; mais à leur mort,