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Page:Gaston Phoebus - La Chasse, J-Lavallee, 1854.djvu/22

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s’engagea à faire remettre à Gaston le Bigorre, auquel celui-ci prétendait avoir droit comme héritier de Constance de Moncade. De son côté, le comte de Foix promit de faire livrer aux Français la ville de Lourdes. Elle était défendue par un chevalier de sa famille, appelé Pierre Arnault de Béarn. Il le fit mander auprès de lui. Ce brave gentilhomme, avant de se rendre à cette invitation, confia le commandement de la place à son frère Jean de Béarn et, en présence de toute la garnison, il lui fit jurer de ne remettre la place qu’au roi d’Angleterre dont il la tenait ; ensuite il alla trouver le comte de Foix.

Gaston lui fit bon accueil, et, après l’avoir retenu à Orthez pendant quelques jours, il lui dit, en présence de plusieurs seigneurs : « Le duc d’Anjou pense que je favorise la défense du château de Lourdes, et il en est courroucé contre moi. Je ne veux pas encourir la malveillance d’un si haut prince. Ainsi je vous fais commandement, en tant que vous pouvez méfaire envers moi, et par la foi et lignage que vous me devez, que vous rendiez le châtel de Lourdes.»

Bien qu’Arnault de Béarn s’attendit à cette demande, en se l’entendant adresser publiquement, il demeura tout interdit ; mais son trouble ne dura qu’un instant, et il répondit avec fermeté : « Monseigneur, vraiment je vous dois foi et hommage, car je suis un pauvre chevalier de votre sang et de votre terre ; mais le châtel de Lourdes ne vous rendrai-je jà. Vous m’avez mandé, si pouvez faire de moi ce qu’il vous plaira ; je le tiens du roi d’Angleterre qui m’y a mis et établi, et à personne qui soit je ne le rendrai fors à lui. » Gaston n’était pas accoutumé à ce qu’on lui résistât. La réponse loyale du gouverneur de Lourdes le transporta de fureur. « Oh ! traître, s’écria-t-il, tu as dit non ; tu ne l’as pas dit pour rien. » Et, se précipitant sur le malheureux chevalier, il le frappa de cinq coups de dague, sans que celui-ci essayât de se défendre. « Ah ! Monseigneur, disoit-il, vous ne faites pas gentillesse : vous m’avez mandé et me occiez. » Ces paroles ne désarmèrent pas Gaston, il fit jeter le blessé dans un cachot où bientôt il