abondamment au peuple, qu’elle ennoblissait en l’élevant à la liberté morale. Qu’a-t-on fait de ce peuple depuis un demi-siècle ? On l’a cruellement démoralisé. Démoralisé par la suppression des ordres religieux, dévoués à son instruction, à l’instruction de ses enfants et au soulagement de ses misères morales. Démoralisé par la suppression des corps d’état qui, malgré leurs imperfections, n’en étaient pas moins des écoles de discipline, de probité et de bonne conduite. Démoralisé par l’indifférence absolue des classes régnantes pour la religion, base nécessaire de la moralité. Démoralisé par les railleries et les sarcasmes dont elles ont poursuivi et laissé poursuivre dans leurs ateliers, dans leurs usines, dans leurs manufactures, et les hommes, et les choses, et les pratiques de la religion. Démoralisé par l’exigence tyrannique du travail du dimanche, ce qui a forcément constitué les classes ouvrières en dehors des lois de la morale chrétienne. Ici la France a surpassé son modèle : elle est allée plus loin que l’Angleterre. Tandis que chez nos voisins le grand mouvement industriel s’arrête chaque dimanche, chez nous il est perpétuel. Démoralisé par l’ignorance de la religion dans laquelle on l’a condamné à grandir ; et plus encore par la mauvaise instruction qu’on lui a donnée. Démoralisé par les mauvaises lois, par les mauvais livres, par les journaux plus mauvais encore, et par l’irrésistible scandale des mœurs publiques et privées, sociales et industrielles.
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