Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 1.djvu/364

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tâché d’y célébrer vos perfections ; mais la copie est bien loin de l’original, et mes vers n’ont point les brillants qu’il faut pour célébrer ceux de vos yeux. »

La jeune dame lut ces vers attentivement, et dit en les mettant dans sa ceinture :

« Quoiqu’ils contiennent beaucoup de flatteries, ils ne sont vraiment pas mal tournés. »

Puis elle ajusta son voile et sortit de la boutique en laissant tomber avec un accent qui pénétra le cœur de Mahmoud-Ben-Ahmed :

« Je viens quelquefois, au retour du bain, acheter des essences et des boîtes de parfumerie chez Bedredin. »

Le marchand félicita Mahmoud-Ben-Ahmed de sa bonne fortune, et, l’emmenant tout au fond de sa boutique, il lui dit bien bas à l’oreille :

« Cette jeune dame n’est autre que la princesse Ayesha, fille du calife. »

Mahmoud-Ben-Ahmed rentra chez lui tout étourdi de son bonheur et n’osant y croire. Cependant, quelque modeste qu’il fût, il ne pouvait se dissimuler que la princesse Ayesha ne l’eût regardé d’un œil favorable. Le hasard, ce grand entremetteur, avait été au delà de ses plus audacieuses espérances. Combien il se félicita alors de ne pas avoir cédé aux suggestions de ses amis qui l’engageaient à prendre femme, et aux portraits séduisants que lui faisaient les vieilles des jeunes filles à marier qui ont tou-