Page:Gautier - Fleurs d’orient.djvu/287

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pas ton sommeil, à cause de lui ? Tu voulais éprouver sa constance, et il dut venir, cent nuits de suite, à travers neiges et tempêtes devant ton palais des montagnes. Te souviens-tu de l’avant-dernier matin, où on le trouva, pâle et froid, comme la neige qui lui servait de lit ?… Et qui donc aurait pu toucher ton cœur, puisque le conquérant des âmes, Nari-Hira, pour qui je mourrais en riant, a pleuré en vain à tes pieds, lui qui n’avait jamais pleuré ?

— Ah ! ces larmes-là ne sont pas encore taries, dit le prince en soupirant. Komati, Komati, pourquoi donc nous as-tu quittés ?

Alors Komati répondit d’une voix lente et basse :

— Tu veux le savoir, Nari-Hira ? Eh bien ! avant de disparaitre à jamais, à toi je le dirai, le secret de mon âme, et ce sera la dernière fois que ma voix parlera du passé.

Je n’étais ni cruelle ni froide, comme on l’a cru, mais orgueilleuse et affamée de perfection. Je méprisais cette beauté, qui me valait tant de vaines louanges, pour ne songer qu’à