Page:Gautier - Histoire du romantisme, 1874.djvu/148

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même que la tapisserie de Bayeux, s’éclairait par une fenêtre à vitraux allemands ou suisses ; une cheminée en chêne sculpté, une glace à cadre de terre cuite où se déroulaient, à travers les arabesques de l’ornementation, les principales scènes du roman de Notre-Dame de Paris, un buste de nègre en pierre de touche, quelques fragments de boiserie antique, une grande pendule en marqueterie, en écaille et en cuivre, une chaise longue et un fauteuil en bambou de Chine, tel était l’ameublement de ce petit salon, dont la plus grande singularité consistait en un lutrin mobile tournant comme une roue, et destiné à porter des in-folio sur ses palettes ; une vieille Bible ouverte et posée sur ses rayons faisait comprendre l’usage et l’utilité de ce meuble de bénédictin.

Nous n’en avons pas encore dit la principale richesse, un dessin magnifique représentant les bords du Rhin, illustration du livre exécutée par la main qui l’a écrit.

Victor Hugo, s’il n’était pas poète, serait un peintre de premier ordre ; il excelle à mêler, dans des fantaisies sombres et farouches, les effets de clair-obscur de Goya à la terreur architecturale de Piranèse ; il sait, au milieu d’ombres menaçantes, ébaucher d’un rayon de lune ou d’un éclat de foudre, les tours d’un bourg démantelé, et sur un rayon livide de soleil couchant découper en noir la silhouette d’une ville lointaine avec sa série d’aiguilles, de clochers et de beffrois. Bien des décorateurs lui envieraient