Page:Gautier - Histoire du romantisme, 1874.djvu/95

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour enlever sa maîtresse. Le mystère était écrit en vers de huit pieds, comme les anciens mystères.

Le Prince des sots était précédé d’un prologue de notre composition destiné à préparer le public à l’étrangeté du spectacle, car des pièces dans le goût de la grande dyablerie de Douai et des Cortez de la mort ne sont plus guère à la mode du jour. Nous avions même joint au manuscrit un dessin colorié représentant la gueule d’Enfer avec une naïveté gothique affectée. Nous donnons ce renseignement et ce signalement à notre cher ami et confrère Ch. Asselineau, l’archiviste Lindurst du romantisme qui retire de l’oubli tous ces volumes aux vignettes étranges, à la typographie caractéristique, qu’il catalogue, décrit, adorne avec l’enthousiasme minutieux du vrai bibliophile.

M. Asselineau, comme tout être délicat favorisé par le ciel d’une jolie manie, a sa tulipe noire, son dalhia bleu, son desideratum ; il voudrait posséder en original le Prince des sots de Gérard ! Ambition chimérique, idéal irréalisable ! et il le cherche depuis longues années, espérant, désespérant, se rattachant à la moindre indication, remuant des montagnes de papiers, fouillant les vieux carions de théâtre, cage des anciens rossignols. Mais toujours en vain, — le manuscrit insaisissable fuit en sautillant devant l’opiniâtre poursuite du bibliophile parisien comme le Chastre, de Méry, devant le contrebassiste dont Alexandre Dumas a mis si joyeusement et si spirituellement les aventures en scène au Théâtre histo-