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L’ORIENT.

allez tomber aux armes ; et pour l’Indien, l’arme est un prétexte à damasquinages, ciselures, sculptures, incrustations de toutes sortes : l’or, l’argent, le burgau, la nacre, le corail, les diamants, les turquoises et les perles laissent à peine soupçonner le fer. Peut-être peut-on aussi se tuer avec ces bijoux, mais ce n’est qu’une question subsidiaire. Ces cottes de mailles, fines toiles d’acier moirées d’or, ces casques aux formes étranges, capricieuses, ces boucliers de peau d’hippopotame ou de rhinocéros, incrustés d’écaille de tortue, constellés de boules de métal, ces épées aux poignées ciselées à jour, où la main d’une jolie femme entrerait à peine, tellement les peuples orientaux ont les extrémités délicates, ces flèches mogoles barbelées, ces kriss malais ondulés comme des flammes, empoisonnés dans le suc de lupa et munis d’hameçons pour ramener les entrailles de la victime, ces hallebardes dentelées, découpées en croissant, ces masses d’armes garnies de chaînettes et de pointes, rappellent involontairement les formes et les habitudes de