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Page:Gautier - L’art moderne, Lévy, 1856.djvu/34

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accompli, a toujours servi à donner de l’homogénéité aux éléments hétérogènes et mêlés depuis peu, dont les nations se composaient alors.

Du Christ nous passons à Mahomet et du pape au calife, de la civilisation catholique à la civilisation musulmane. Haroun-al-Raschid, le fabuleux et pourtant très-réel sultan des Mille et une Nuits, réunit les savants, les poëtes et les philosophes dans son palais, enrichi des merveilles du luxe oriental ; il tient une espèce de divan littéraire, et les jambes croisées, l’œil éclatant et fixe, sa main fine caressant sa barbe noire, il écoute une de ces dissertations subtiles et fleuries auxquelles se plaît le génie arabe ; son fidèle Giaffar est près de lui, et dans le fond du tableau scintillent vaguement les trésors vrais ou fantastiques du calife, le paon de pierreries, l’arbre d’or chargé d’oiseaux mécaniques qui chantent, l’éléphant de cristal de roche, l’orgue et l’horloge destinée à Charlemagne ; l’Orient a pris une des premières places dans la procession de l’humanité et recueilli des arts de la Grèce tout ce qui pouvait admettre une religion iconoclaste ; l’architecture, la poésie, la philosophie, l’astrologie, l’alchimie, la médecine, fleurissent sous ces intelligents califes Abassides. Aristote est traduit, et le dépôt de la science antique traverse la nuit épaisse du moyen âge. Le second entre-colonnement est occupé par les savants et les artistes, qui se retirent chargés des témoignages de la magnificence d’Haroun-al-Raschid.

Ces compositions nous conduisent jusqu’à la statue de Charlemagne, qui fait face à celle d’Alexandre, placée à l’autre bout de la croix. Charlemagne eut, comme Alexandre, un des plus vastes empires qu’il ait été donné à l’homme de commander, et put sans vanité prendre, avec l’aigle romaine [sic]