— Je suis touché d’un tel honneur, dit le prince qui s’assit et prit une mangue.
— Tu vois en moi une pénitente, reprit Ourvaci après un moment de silence, une mortelle lourde de péchés, qui se rend, dans le plus modeste équipage, à la vieille pagode de Sadraspatnam.
— Que ton pèlerinage soit heureux ! dit Chanda-Saïb. Je me réjouis de m’être trouvé sur ton chemin, et de pouvoir te dire qu’il y a du danger à poursuivre ton voyage sans précaution.
— Qu’est-ce donc ?
— La guerre. Un combat, qui m’intéresse au plus haut point, aura lieu tout à l’heure, à quelques pas d’ici.
— Et quels sont les combattants ?
— L’armée de mon mortel ennemi, de celui qui usurpe mon trône, du traître Allah-Verdi, qui se dit nabab du Carnatic, et une petite troupe de Français.
— Les Français, qu’est-ce que cela ? Cette race aux cheveux blancs, peut-être ?
— Ce sont les soldats du grand gouverneur de Pondichéry, un homme que j’estime au point que je lui ai confié ce que j’ai de plus cher au monde, c’est-à-dire ma femme et mon fils.
La reine eut un sourire de dédain, et échangea un regard avec le jeune cavalier de tout à l’heure, qui n’était autre que la princesse Lila.
— Et ce sont les apprêts de ce combat que tu regardais si attentivement ?
— Justement ! Et je te demande en grâce, Lumière du monde, la permission de retourner à mon poste