Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/170

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Le commandant Law a fait une capture importante, celle d’un officier, d’une figure pâle et digne, dont l’habit écarlate est tout chamarré d’or ; c’est le major Lawrence, un homme déjà illustre, qui, ne voulant pas fuir avec ses soldats, est resté seul au milieu des ennemis, et s’est laissé désarmer.

Les assiégés étaient tout heureux de leurs succès ; ils pouvaient espérer garder le fort d’Ariancopan, ce qui mettrait leurs adversaires dans un grand embarras ; ils les sentaient hésitants et indécis, et remarquaient qu’ils refaisaient les retranchements détruits avec une lenteur extrême.

Quelques jours après cette sortie heureuse, tout le monde était à son poste, surveillant le travail de l’ennemi, le démolissant à mesure et harcelant les travailleurs ; quand, tout à coup, un fracas épouvantable éclata au milieu d’eux, faisant trembler le sol et envoyant vers le ciel une gerbe de feu qui retomba en pluie de débris. Le fort oscilla un moment, puis s’écroula, et une panique emporta vers la ville beaucoup de ces héros d’hier.

Lorsque le silence s’est fait, de longs cris et des gémissements le remplissent. Les officiers se précipitent vers les ruines fumantes, jonchées de blessés et de morts. Qu’est-il arrivé ? Une horrible catastrophe, dans laquelle les Anglais ne sont pour rien : deux chariots de poudre viennent de sauter au milieu du fort, et cent hommes sont morts, ou hors de combat.

D’entre les décombres sortent d’affreux hurlements, des plaintes faibles ; mais il y a encore des explosions partielles, l’on n’ose pas approcher.