Page:Gautier - La Peau de tigre 1866.djvu/30

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simodo supportable, et Ninette, c’était Esméralda blonde, et qui n’avait pas été élevée chez les truands.

Cette jolie tête renfermait un charmant esprit, esprit de sept ans, bien entendu, et cette douce petite poitrine blanche un bon petit cœur palpitant au récit des belles actions, et s’attendrissant aux malheurs vrais ou imaginaires ; car, si Ninette aimait bien les poupées, elle aimait encore plus les histoires, et surtout les contes de fées, qui sont peut-être les seules histoires vraies.

Ce qui la frappait surtout, c’étaient ces beaux contes où l’on voit des fées accourir pour douer une princesse nouvellement née : les unes dans une noix traînée par des scarabées verts, les autres dans un carrosse d’écorce de potiron attelé de rats harnachés en toile d’araignée ; celle-ci en aérostat dans une bulle d’eau savonneuse avec une barbe de chardon pour nacelle, celle-là à cheval sur un rayon de clair de lune soigneusement fourbi. Ninette regrettait fort ce temps-là, et se demandait pourquoi les bonnes fées ne s’empressaient plus autour du berceau des petites filles, comme si elle n’eût pas été aussi richement douée que toutes les princesses des contes de Perrault et de madame d’Aulnoy ; mais Ninette était modeste, et ne savait pas que