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Page:Gautier - La Peau de tigre 1866.djvu/344

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font aux talons des bas que l’on veut faire durer longtemps ; le dedans est soutenu d’une forte toile, et le bout extrême d’une languette de cuir ou de carton plus ou moins épaisse, selon la légèreté du sujet. Le reste du chausson est chevronné extérieurement d’un lacis de rubans cousus à cheval ; il y a aussi des piqûres au quartier, maintenu en outre par un petit bout de faveur de la couleur du bas, à la manière andalouse. Ce chausson, fourni par le théâtre, doit servir six fois s’il est blanc, dix fois s’il est chair, et la danseuse écrit sur un carnet les noms des représentations où il a servi. Maintenant que le rat est sous les armes, décrivons le lieu de ses exercices. C’est une grande salle voûtée, badigeonnée avec de la peinture au lait, et lambrissée d’un ton chocolat assez horrible. Un plancher en pente, comme celui d’un théâtre, descend du fond de la salle vers le fauteuil du maître, dont le dos est tourné à une glace passablement terne ; un grand poêle de faïence qu’il n’est pas besoin de chauffer beaucoup, tant le travail des sylphides est violent et provoque à la sueur, occupe un angle de la pièce ; adroite et à gauche, d’étroites petites portes mènent aux vestiaires ; un méchant paravent bleu à fleurs blanches, posé à angles aigus devant la porte d’entrée, empêche le perfide vent