Page:Gautier - La Peau de tigre 1866.djvu/366

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ou ses volants multiples, nous semble aussi belle et aussi bien costumée que possible, et nous ne voyons pas trop ce que l’art aurait à lui reprocher. Par malheur, il n’y a pas de peintres contemporains ; ceux qui paraissent vivre de notre temps appartiennent à des époques disparues. L’antiquité mal comprise les empêche de sentir le présent. Ils ont une forme de beau préconçue, et l’idéal moderne est lettre close pour eux.

Une objection plus sérieuse serait celle de l’incompatibilité de la crinoline avec l’architecture et l’ameublement modernes. Lorsque les femmes portaient des paniers, les salons étaient vastes, les portes s’ouvraient à deux larges battants, les fauteuils écartaient leurs bras, les carrosses admettaient aisément cette envergure de jupes ; les loges de théâtre ne ressemblaient pas à des tiroirs de commode. Eh bien, on fera des salons plus grands, on changera la forme des meubles et des voitures, on démolira les théâtres ! La belle affaire ! car les femmes ne renonceront pas plus à la crinoline qu’à la poudre de riz, — autre thème de déclamation banale que ne devrait varier aucun artiste.

Avec le rare sentiment d’harmonie qui les caractérise, les femmes ont compris qu’il y avait une sorte de dissonance entre la grande toilette et la figure naturelle.