Page:Gautier - La sœur du soleil.djvu/225

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— Il y en a qui le valent bien, dit Toza.

— Tu crois ! s’écria Tika d’un air incrédule, je ne l’ai jamais entendu dire.

— Il l’aime éperdùment, n’est-ce pas ?

— Comment pourrait-on ne pas l’aimer !

— Elle est belle, c’est vrai, dit le prince en jetant un regard vers Fatkoura.

— Tu la trouves belle, aujourd’hui que ses yeux sont noyés dans les larmes, qu’elle dédaigne les fards et la parure ! Si tu l’avais vue lorsqu’elle était heureuse !

— Je ferai tous mes efforts pour ramener le sourire sur ses lèvres, dit Toza.

— Il n’est qu’un moyen pour cela.

— Lequel ? Indique-le-moi.

— C’est de la rendre à son époux.

— Tu te moques de moi, s’écria le prince en fronçant le sourcil.

— Moi, seigneur ! dit Tika qui joignit les mains ; crois-tu que je te trompe et, que ce ne serait pas le meilleur moyen de rendre ma maîtresse heureuse ? Je sais bien que tu ne l’emploieras pas, aussi tu ne la verras jamais sourire.

— Eh bien ! elle restera triste, dit Toza ; je la garderai près de moi.

— Hélas ! soupira Tika.

— Tais-toi ! s’écria le prince en frappant du pied, pourquoi dis-tu : hélas ! que t’importe à toi de la servir ici ou là-bas, ne vois-tu pas qu’elle m’a charmé et que je suis malheureux ?

Le prince s’éloigna après avoir dit ces mots, tandis que Tika feignait d’être plongée dans une stupéfaction profonde.

— Je ne croyais pas que tu en vins si vite aux confidences, murmura-t-elle quand il fut loin, je t’avais