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le collier des jours

Dans une terrine, à demi pleine d’eau et de vinaigre, trempaient des verges menaçantes. La sœur Fulgence les saisissait, vous faisait mettre à genoux, troussait vos jupes et vous fouettait d’une main alerte. Après la leçon, sûre de ne pas l’échapper, j’allais moi-même dans la chambre des exécutions et je me mettais en posture.

Je fis un jour à la « professeuse » cette proposition ingénieuse : « Ne pas prendre de leçon et être fouettée tout de suite » puisque l’issue était fatale, cela éviterait, à elle, la peine, à moi, l’ennui. D’un air à la fois furieux et rieur, la sœur Fulgence me répondit

— Non, mademoiselle, vous prendrez d’abord votre leçon, et vous serez fouettée, ensuite.

Après deux ans de ce régime, j’étais parvenue à jouer une ligne de la polka : Fleur des champs et fleurs des salons, et une ligne et demie de : La Ronde des Porcherons, mais j’avais la musique en horreur !