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le collier des jours

— Enfin, conclut tante Zoé, après un travail terrible, pour leur frayer un chemin, il les fit évader… par les commodités… et ne sortit lui-même, que lorsque tous les prisonniers furent dehors. Ils se cachèrent si bien, qu’on ne put les reprendre, et personne n’eut le cou coupé.

— C’est vrai, grand-père, tu as fait cela ?

— Ma foi, il y a si longtemps qu’il ne me semble plus que c’est à moi que c’est arrivé. Pourtant je revois toujours la scène, comme si j’y étais. Il y eut surtout un certain abbé, corpulent et peu agile, qui ne pouvait passer. On le tirait par les pieds… il manqua de faire tout échouer… plutôt que d’en abandonner un seul, aucun ne serait parti… on n’oublie pas un pareil quart d’heure.

— On t’a donné la croix, au moins pour cela ? demandai-je.

— Ah bien oui ! tu ne connais pas le pèlerin, s’écria tante Zoé, quand les Bourbons sont revenus, il a refusé toutes les faveurs.

— Cela lui suffisait d’avoir été un héros, dit tante Lili, il a bien fait.

— Allons, assez ! grogna le grand-père qui avait une quinte de toux, le héros est à présent un vieux catarrheux. Passe-moi ma boîte de pâte pectorale.