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le collier des jours

sence, la Vierge a tenu sa place et fait son office ; maintenant, toute lumineuse, elle remonte sur l’autel, et reprend son geste, qui bénit et pardonne. Ce délicieux conte, que Nodier avait pris dans la légende dorée, m’était resté si net dans la mémoire, que sans jamais l’avoir relu, j’ai pu, il y a quelques années, le prendre pour thème d’un livret d’opéra…

Cependant le livre sur lequel je m’acharnais le plus était le vieux poème, en d’innombrables vers, de Guillaume de Loris : Le Roman de la Rose. On voulait toujours me le reprendre.

— Laisse cela, disait tante Lili, c’est un livre infâme, pas du tout pour les petites filles.

— Qu’est-ce que tu veux qu’elle y comprenne ? reprenait tante Zoé, c’est comme si elle lisait du turc, ça la fait tenir tranquille, et puisqu’il n’y a pas d’images…

Ces propos me donnaient encore plus envie de déchiffrer le grimoire. J’y prenais une peine incroyable et, à travers le vieux français, il me semblait m’enfoncer dans des broussailles inextricables. Je ne reculais pas pourtant, le mystère dont l’histoire restait enveloppée la rendait plus attrayante, et je finissais par en saisir le fil : Dame Oyseuse et le château de Déduyt, où elle introduit un jeune pèlerin, qui est reçu par Bel-Accueil et par Doux-Regard. Le parterre de roses, défendu par une haie