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pouvait me saisir à temps. Je me vengeais comme je pouvais. Les confitures étant sous clé, je m’en prenais aux légumes ; il m’arriva de dévorer toute crue, une botte de carottes, ce dont j’eus lieu de me repentir.

Un autre visiteur, qui ne venait que rarement, et dont j’ai gardé cependant un souvenir très précis, était le comte Henri de Poudens, cousin germain de mon père. Il était grand, très fort, avec une belle figure joyeuse, un peu déparée par un accident qui lui avait fendu la lèvre supérieure. Sa résidence habituelle était, je crois, en Gascogne où il avait des châteaux et des terres. Il venait sans doute aussi dans les environs de Paris, chez l’abbé de Montesquiou, au château de Maupertuis, près de Coulommiers. Les tantes en parlaient sans cesse, de ce château de Maupertuis ; l’abbé avait été le parrain de Zoé, et, quand elles étaient fillettes, elles avaient souvent passé leurs vacances chez le parrain, avec mon père, qui a laissé comme souvenir dans la petite église de Maupertuis un tableau représentant Saint-Pierre, qui décore aujourd’hui encore, peut-être, le maître-autel.

Henri de Poudens m’avait fait un cadeau superbe et c’est la reconnaissance qui m’a empêchée d’oublier cet aimable cousin, que j’ai vu si peu. Ce cadeau était une très grande pou-