Page:Gautier - Le Dragon Impérial, Armand Colin et Cie, 1893.djvu/172

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larges coffres de laque fleuris d’or, d’où ruisselaient à demi déployées des étoffes resplendissantes ; les autres des plateaux d’or débordant de plumes multicolores, d’aigrettes, de calottes brodées, des boîtes précieuses renfermant les globules honorifiques, et des vases de jade où fumaient des parfums.

Le prince, impatient, plongea ses bras dans les coffres et retira les vêtements l’un après l’autre. Il dispersait à terre ceux qui ne lui plaisaient pas. Lorsqu’il eut préféré une robe qui lui sembla digne de plaire à Yo-Men-Li, il se livra aux serviteurs qui le lavèrent avec du lait odorant, l’inondèrent d’essence de thé, terminèrent sa longue natte par des brindilles de soie, puis le revêtirent du costume choisi. C’étaient une robe de damas, couleur de saphir, ramagée de broderies d’or et bordée d’une haute bande de satin dont les couleurs alternées formaient un triple arc-en-ciel ondoyant, un manteau court, aux larges manches, en satin jaune, qui portait sur la poitrine et sur les épaules le Dragon à Cinq Griffes, et une calotte de brocart jaune ornée d’un œil de chat. Couvert de ces splendeurs, il mit à son pouce une bague d’or au chaton formé d’un gros rubis conique et lisse, dont la douce caresse rafraîchit les paupières, puis, ayant fait appeler l’eunuque muet, il lui dit :

— Vas attendre ma bien-aimée à la porte de la Ville Rouge ; il est temps.

L’eunuque s’éloigna.

— Comme la fièvre palpite dans mes tempes, disait le prince, à demi couché sur le banc d’honneur ;