Page:Gautier - Le Dragon Impérial, Armand Colin et Cie, 1893.djvu/254

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fuyaient par groupes, des faisans superbes et des paons s’envolaient lourdement.

Tout à coup, au milieu d’abois aigus, un loup descendit la pente d’une colline, poursuivi par une troupe de grands chiens au corps bleu, à la queue touffue, à la tête ornée d’une aigrette de poils. Au même moment parurent au faite de la côte des cavaliers pompeusement vêtus ; et l’un d’eux, plus superbe que les autres, portait sur un poing un immense oiseau de proie.

Les cavaliers s’arrêtèrent et suivirent du regard le loup et les chiens. Furieuse, les yeux sanglants, la bête sauvage s’était retournée et tenait tête aux bêtes domestiques, qui formaient autour d’elle un cercle hurlant. Ses crocs blancs infligeaient de cruelles morsures. Par moments elle s’élançait et arrachait un lambeau de chair à ses ennemis, qui s’éloignèrent successivement, poussant des cris de détresse.

Alors, du haut de la colline on rappela les chiens, et le grand cavalier lâcha son oiseau.

L’épervier étendit ses larges ailes et se précipita vers le loup qui fuyait : il plana au-dessus de lui et longtemps le vol furieux suivit la course épouvantée. Puis, brusquement, l’oiseau s’abattit et serra la gorge du quadrupède dans ses serres formidables. Une lutte terrible s’engagea. Le grand cavalier, ému, se penchait sur le cou de son cheval et regardait attentivement : l’épervier couvrait entièrement son ennemi de ses ailes qu’on voyait battre de temps en temps ; on entendait les aboiements