Page:Gautier - Le Dragon Impérial, Armand Colin et Cie, 1893.djvu/272

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ne sera plus notre ville ! Oh ! misérables flatteurs, qu’avez-vous fait de moi ? qu’avez-vous fait de la Chine glorieuse ?

L’empereur cacha son visage dans ses mains, et laissant les mandarins ternir leur front dans la poussière, il s’éloigna ; il gagna le palais, gravit les escaliers d’albâtre, et, de terrasse en terrasse, monta jusqu’à la petite plate-forme qui domine les toitures de l’édifice, et que surmonte le globe d’or où resplendit le Dragon Long.

— Ah ! s’écria-t-il en tendant les bras vers lui, toi, mon compagnon, toi, mon frère, tu ne me trahiras pas !

Puis l’empereur baissa les yeux. La ville se déroulait à ses pieds, obscure et tumultueuse. Il entendait monter un bruit hostile et menaçant.

Cependant, au delà des murs d’enceinte, dans la plaine démesurée, une masse fourmillante ondulait et roulait et montait.

— Qu’est-ce que cette mer, dit Kang-Shi, qui va submerger Pei-King ?

Le soleil couchant, effleurant la masse mouvante, arracha çà et là des cris de lumière à des piques et à des cuirasses.

— Mon compagnon, mon frère, cria désespérément l’empereur, c’est leur armée !