Page:Gautier - Le Roman de la momie, Fasquelle, 1899.djvu/191

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jouissait silencieusement du bonheur de rester près de lui, dans le pavillon dont il lui avait permis l’accès.

Si Poëri avait tourné la tête vers elle, il eût été frappé sans doute de la lumière humide de ses yeux, des rougeurs subites qui passaient sur ses belles joues comme des nuages roses, du battement profond de son cœur qu’on devinait au tremblement de son sein. Mais, assis à la table, il se penchait sur une feuille de papyrus où, puisant de l’encre dans une tablette d’albâtre creusée, il inscrivait des comptes en chiffres démotiques à l’aide d’un roseau.

Poëri comprenait-il l’amour si visible de Tahoser pour lui ? ou bien, pour quelque raison cachée, faisait-il semblant de ne pas s’en apercevoir ? Ses manières envers elle étaient douces, bienveillantes, mais réservées comme s’il eût voulu prévenir ou refouler quelque aveu importun auquel il lui eût été pénible de répondre. Pourtant la fausse Hora était bien belle ; ses charmes, trahis par la pauvreté de sa toilette, n’en avaient que plus de puissance ; et, comme on voit aux heures les plus chaudes du jour une vapeur lumineuse frissonner sur la terre luisante, une atmosphère d’amour frissonnait autour