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Page:Gautier - Le Roman de la momie, Fasquelle, 1899.djvu/196

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fil. La journée s’avançait, et déjà le soleil, levé derrière Thèbes, avait franchi le Nil et se dirigeait vers la chaîne libyque, derrière laquelle son disque se couche chaque soir. C’était l’heure où les animaux reviennent des champs et rentrent à l’étable. Elle assista, près de Poëri, à ce grand défilé pastoral.

On vit d’abord s’avancer un immense troupeau de bœufs, les uns blancs, les autres roux ; ceux-ci noirs et mouchetés de points clairs, ceux-là pie, quelques-uns rayés de zébrures sombres ; il y en avait de tout pelage et de toute nuance ; ils passaient levant leurs mufles lustrés, d’où pendaient des filaments de bave, ouvrant leurs grands yeux doux. Les plus impatients, sentant l’étable, se dressaient quelques instants à demi et apparaissaient au-dessus de la foule cornue, avec laquelle, en retombant, ils se confondaient bientôt ; les moins adroits, devancés par leurs compagnons, poussaient de longs meuglements plaintifs comme pour protester.

Près des bœufs marchaient les gardiens avec leur fouet et leur corde roulée.

Arrivés devant Poëri, ils s’agenouillaient, et les coudes aux flancs, touchaient la terre du front en signe de respect.