Page:Gautier - Le Roman de la momie, Fasquelle, 1899.djvu/91

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— Maîtresse, répondit la harpiste, le poète et le musicien savent tout ; les dieux leur révèlent les choses cachées ; ils expriment dans leurs rythmes ce que la pensée conçoit à peine et ce que la langue balbutie confusément. Mais si mon chant t’attriste, je puis, en changeant de mode, faire naître des idées plus riantes dans ton esprit. »

Et Satou attaqua les cordes de sa harpe avec une énergie joyeuse et sur un rythme vif que le tympanon accentuait de coups pressés ; après ce prélude, elle entonna un chant célébrant les charmes du vin, l’enivrement des parfums et le délire de la danse.

Quelques-unes des femmes qui, assises sur ces pliants à cols de cygnes bleus dont le bec jaune mord les bâtons du siège, ou agenouillées sur des coussins écarlates gonflés de barbe de chardon, gardaient, sous l’influence de la musique de Satou, des poses d’une langueur désespérée, frissonnèrent, ouvrirent les narines, aspirèrent le rythme magique, se dressèrent sur leurs pieds, et, mues d’une impulsion irrésistible, se mirent à danser.

Une coiffure en forme de casque échancré à l’oreille enveloppait leur chevelure, dont quel-