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LE COLLIER DES JOURS

— Je m’appelle Cosima, nous dit-elle, et, dans mon entourage, on avait pris la mauvaise habitude, qui m’horripilait, de m’appeler « Cos ». J’ai donné ce nom à mon chien, et, depuis, on n’ose plus m’appeler autrement que Cosima.

Et la causerie s’engage, heureuse, vive, ardente, le Maître presque aussi joyeux que les disciples ; et nous avons tant de choses à nous dire !…

Wagner parle le français mieux que très bien : il le parle correctement, mais à sa manière, avec des libertés et des audaces. Quand il ne trouve pas un mot pour rendre sa pensée ou que ce mot lui paraît ne pas exister, il le crée, et toujours si clair et si logique qu’on n’hésite pas à le comprendre. Il nous parle de Paris, où il a beaucoup souffert et qu’il a beaucoup aimé, et, sans amertume, de la grande bataille de Tannhäuser, dont nous avons, nous, tant de honte pour notre pays. Il y a gagné, dit-il, un groupe de chauds partisans qui le consolent de la défaite : ceux qui l’aiment, à Paris, l’aiment mieux et plus que ses admirateurs d’Allemagne. Le Français, plus vibrant, plus expansif, quand il comprend, comprend d’emblée, et la ferveur de son enthousiasme est réconfortante. Le public