Page:Gautier - Le Vieux de la montagne, Armand Colin et Cie, 1893.djvu/147

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qu’il a versé dans le premier emportement de son indignation, exige seulement que celui qui a frappé Abou Abd-Allah soit dénoncé et puni de mort.

— Certes ! c’est grand’pitié que tant d’innocents aient payé pour le coupable. Mais le forfait est si odieux qu’il me faut reconnaître que cette cruauté, déplorée par nous avec des larmes, est équitable ; ton maître montre même une modération dont je lui sais gré. Dis-lui que c’est de ma propre volonté que moi et mes soldats nous resterons sur son territoire. Je jure que pas un de nous, excepté le messager que je vais envoyer, sur l’heure, à Odon de Saint-Amant, le Grand Maître du Temple, ne quittera ce lieu avant que le coupable ait expié son crime.

— C’est bien ! Sois donc en paix : tu es ici à l’abri de tout mal.

— Dieu te garde ! dit le roi.

L’envoyé remonta à cheval et, suivi de ses compagnons, gravit au galop la colline. Puis les sabots des chevaux sonnèrent, comme sur un tambour, contre le bois du pont-levis, qui se releva derrière la petite troupe et masqua de nouveau la haute porte ogivale, étouffant subitement la claire fanfare des trompettes enchantées.