Page:Gautier - Le Vieux de la montagne, Armand Colin et Cie, 1893.djvu/154

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

supérieur aux choses de la terre, dans les mêmes proportions que la cuisine.

Le comte de Tripoli éclata de rire :

— C’est donc pour cela, coquin, qu’en rêve tu jures par Allah ?

— Mais, au ciel, c’est ainsi qu’on appelle Dieu.

— Misérable ! s’écria Hugues en le saisissant à la gorge.

Raymond le retint.

— Laissez-le, seigneur, dit-il : le malheureux n’a pas toute sa raison. Je devine ce qui lui est arrivé. Les affidés du Vieux de la Montagne lui auront fait boire le haschîsch, ce philtre magique qui donne des extases.

— Vous croyez ?

— Ce n’est pas la première fois que j’entends pareil récit. Voyons, continua-t-il, en s’adressant à Urbain, brave écuyer, vaillant défenseur du Christ, secoue cette torpeur et tâche de te souvenir. Où étais-tu ? Que faisais-tu au moment de ta mort ?

— Ma foi, je devisais gaiement avec des inconnus fort courtois.

— Des païens ?

— Non, des écuyers comme moi.