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MALARTIC À L’ŒUVRE.

boyaux. Hélas ! j’ai bien peur que cette innocente abeille soit prise en la toile d’une araignée monstrueuse qui ne la tue avant que nous ne puissions la dépêtrer de ses réseaux trop bien ourdis.

— Je l’écraserai, dit Sigognac en frappant la terre du talon comme s’il tenait l’araignée sous sa botte, je l’écraserai, la bête venimeuse ! »

L’expression terrible de sa physionomie ordinairement si calme et si douce montrait que ce n’était point là une vaine fanfaronnade et qu’il le ferait comme il le disait.

« Çà, dit Hérode, sans perdre plus de temps en paroles, entrons dans le bois et battons-le. Le gibier ne peut pas être encore bien loin. »

En effet, de l’autre côté de la futaie que Sigognac et les comédiens traversèrent, en dépit des broussailles qui leur entravaient les jambes et des gaulis qui leur fouettaient la figure, un carrosse à rideaux fermés détalait de toute la vitesse que pouvait donner à quatre chevaux de poste une mousquetade de coups de fouet. Les deux cavaliers dont Sigognac avait piqué les montures, ayant réussi à les calmer, galopaient près des portières, et l’un d’eux tenait en laisse le cheval de l’homme masqué ; car le compagnon était entré dans la voiture sans doute afin d’empêcher qu’Isabelle ne soulevât les mantelets pour appeler au secours, ou même n’essayât de sauter à terre au péril de sa vie.

À moins d’avoir les bottes de sept lieues que le Petit-Poucet ravit si subtilement à l’Ogre, il était insensé de courir pédestrement après un carrosse mené