ginalité et d’excentricité. C’est même à cause de cela qu’ils sont des poëtes du second ordre. Pour être grand poëte, du moins dans l’acception où l’on prend ce mot, il faut s’adresser aux masses et agir sur elles ; il n’y a guère que des idées générales qui puissent impressionner la foule ; chacun aime à retrouver sa pensée dans l’hymne du poëte : c’est ce qui explique pourquoi la scène se montre si rebelle aux curiosités de la fantaisie. — Les morceaux les plus vantés des poëtes sont ordinairement des lieux communs. Dix vers de Byron sur l’amour, sur le peu de durée de la vie, ou sur tout autre sujet aussi neuf, trouveront plus d’admirateurs que la vision la plus étrange de Jean Paul ou d’Hoffman : cela vient de ce que beaucoup de gens ont été ou sont amoureux, qu’un plus grand nombre encore a peur de mourir, et qu’il en est bien peu qui aient vu passer, même en rêve, les fantastiques silhouettes des conteurs allemands.
Dans les poëtes du second ordre vous retrouverez tout ce que les aristocrates de l’art ont dédaigné de mettre en œuvre : le grotesque, le fantasque, le trivial, l’ignoble, la saillie hasardeuse, le mot forgé, le proverbe populaire, la métaphore hydropique, enfin tout le mauvais goût avec ses bonnes fortunes, avec son clinquant, qui peut être de l’or, avec ses grains de verre, qui risquent d’être des diamants. Ce n’est guère que dans le fumier que se trouvent les perles, témoin Ennius. Pour moi, je préférerais les perles du vieux Romain à tout l’or de Virgile ; il faut un bien gros tas d’or pour valoir une petite poignée de perles.
Je trouve un singulier plaisir à déterrer un beau vers