Page:Gautier - Lucienne, Calmann Lévy, 1877.djvu/121

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maintenant. Vous êtes bien jeune pour tous marier.

— Lucienne, s’écria le jeune homme, tu me caches quelque chose, ou bien tu es une coquette qui se plait à me torturer.

— Moi, vous faire souffrir volontairement ! vous ne pouvez le croire, dit-elle ; ne voyez-vous pas que je souffre plus que vous ?

— Mais pourquoi ne pas être heureux ? qui donc s’oppose à notre bonheur ?

— Mon oncle, dit Lucienne ; il ne veut pas me marier encore. S’il connaissait nos intentions, il refuserait son consentement et m’emmènerait tout de suite.

Jenny revenait.

— Qu’avez-vous donc ? dit-elle en les regardant l’un après l’autre. Vous semblez tristes.

— Pourquoi nous taire devant elle ? dit Adrien. Lucienne croit que M. Provot est défavorable à nos projets.

— Pourquoi donc cela ? dit Jenny. Il me semble que M. Provot est toujours disposé à faire ce que sa nièce ordonne.

— Il est égoïste, sans doute, et veut la garder auprès de lui. Mais quel âge avez-vous, Lucienne ?

— Vingt ans.

— Alors, dans un an, vous êtes maîtresse de vos actions.

— Vous m’attendriez un an ? s’écria Lucienne.

— Croyez-vous donc que je ne vous aimerai plus dans un an ? Je vous attendrai dix ans s’il le