Page:Gautier - Quand on voyage.djvu/322

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le paysage sans nuire à la solitude grandiose du site.

En suivant, pour revenir à la ville, le chemin hors des murs, notre attention fut attirée par une vieille église, l’église de San-Vicente, si notre mémoire ne nous trompe, qui de loin nous semblait en ruine, et qui était, au contraire, en reconstruction. On répare avec beaucoup de tact, de discrétion et de goût, les portions près de s’écrouler. Fait de la même pierre, taillé dans le même style, le morceau neuf se distingue difficilement de l’ancien, et la colonnette placée d’hier ressemble tant à sa sœur ainée, qu’on les croirait du même âge. San-Vicente, dont les fenêtres plein cintre remontent à l’époque romane, a un narthex comme Saint-Marc de Venise, c’est-à-dire une espèce de vestibule ou de porche couvert appliqué extérieurement à l’édifice et sous lequel les fidèles peuvent se promener ou s’asseoir en attendant que les portes s’ouvrent pour les offices. Des inscriptions funèbres se lisaient sur les dalles, des tombeaux aux figures et aux ornements émoussés s’encastraient dans les murs, et des enfants jouaient là, insoucieux des morts que notre œil visionnaire voyait à travers le pavé rendu informe, poussière oubliée dans des débris de cercueil. L’un de ces enfants nous frappa par son caractère gracieu-