Page:Gautier - Quand on voyage.djvu/45

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les chances diverses de la lutte : on faisait tenir les embarcations à distance, et, d’ailleurs, le soleil tombait d’aplomb sur la mer, à ce moment-là ; l’eau tremblotait avec un fourmillement lumineux comme du vif-argent remué, et les canots y faisaient l’effet de taches noires.

Comme nous l’avons dit en commençant, notre intention n’était nullement de faire un récit de ces belles fêtes qui laisseront un si long souvenir ; aussi notons-nous au hasard, en y mêlant quelque idée philosophique, ce qui nous a frappé à notre point de vue de poëte et d’artiste. De noms propres, vous n’enverrez pas un seul dans ces lignes, excepté ceux qui tombent sous notre juridiction ordinaire.

Ainsi que beaucoup d’autres, sur l’Éclair, nous avons suivi à distance respectueuse la revue de la flotte par l’empereur. Nous ne vous raconterons pas l’équipage debout sur les vergues, la réception du canot impérial au bas de l’échelle d’honneur, le défilé sur le pont des soldats de marine, vous savez tout cela mieux que nous ; mais nous tâcherons de vous peindre quelques effets de fumée bizarres. Au départ de l’auguste visiteur, chaque vaisseau saluait à bâbord et à tribord de sa triple rangée de canons ; les coups se suivaient comme réglés par un chronomètre, sans intervalles et pourtant séparés,