Page:Gautier - Quand on voyage.djvu/77

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mant une sorte de trapèze, entourée de murailles crénelées démantelées à demi, où s’encastre un lion rampant posant son ongle sur l’écu abbatial ; en face s’ouvre entre deux tours la seconde entrée, dont l’arcade a pour claveau un écusson de granit rendu fruste par le temps et l’air salin, où pourtant l’on distingue encore les armoiries de la ville, « trois saumons sur champ ondé, » blason tout à fait convenable pour ce nid de pêcheurs. Un pont-levis disparu et une herse de fer dont on voit encore quelques dents la défendaient jadis. Cette première place est encombrée de filets et de barques de sauvetage qu’on retire là quand la mer est trop basse ou trop grosse ; mais, comme pour rappeler la destination guerrière du lieu, de chaque côté de la deuxième porte deux énormes pièces de canon en fer, effritées et rongées de rouille, ayant encore leur boulet de pierre au ventre, semblent vous menacer de leur gueule impuissante. Ces pièces, dites les Michelettes, ont été enlevées aux Anglais en 1427, quand ils levèrent le siége du mont Saint-Michel, lassés par une résistance héroïque,

L’une de ces places s’appelle cour du Lion, et l’autre cour de la Herse ; les détails que nous venons de donner disent pourquoi. Au delà commence à grimper entre deux rangs de vieilles maisons qui se touchent par le