Page:Gautier - Tableaux de Siége.djvu/154

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parisiens daignaient à peine s’écarter un peu lorsque la roue allait leur passer dessus, en chiens à qui appartient le haut du pavé. Ils avaient l’embarras du provincial.

Tous les matins se formait devant notre porte un conciliabule présidé par un terrier bien rablé, les pattes un peu coudées en dehors, la lèvre inférieure avancée, la supérieure rebroussée, le poil fauve, zébré de brun et portant un collier de cuir noir papelonné d’écailles de cuivre. Les autres chiens, de race plus vague qui l’entouraient, semblaient lui témoigner beaucoup de considération et l’écouter avec déférence.

L’écouter ! il parlait donc ? Assurément : non pas à la manière des hommes au langage articulé, belle expression homérique pour distinguer notre espèce des bêtes, mais par de petits abois, des grommellements variés, des brochements de babines, des manèges de queue et des jeux de physionomie expressifs. Ce groupe de causeurs quadrupèdes s’entretenait à coup sûr de la situation. De temps à autre un nouveau venu semblait apporter une nouvelle : on la commentait ; puis le cercle se brisait et chacun allait à ses affaires.

Cela se passait au commencement du siége. Le