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« — Bah ! dit Berthe. Je suis sûre que si cette petite folle mourait, elle deviendrait Wili et danserait même après sa mort, comme toutes les filles qui ont trop aimé le bal !

« — Que voulez-vous dire ? » s’écrient les jeunes vendangeuses avec effroi, en se serrant les unes contre les autres.

Berthe alors, sur une musique lugubre, semble dépeindre une apparition des morts revenant au monde et dansant ensemble. La terreur des villageoises est à son comble. Giselle seule en rit, et répond gaiement à sa mère qu’elle est incorrigible, et que, morte ou vivante, elle dansera toujours.

« — Et pourtant, ajoute Berthe, cela ne te vaut rien… Il s’agit de ta santé, de ta vie peut-être !…

« — Elle est bien délicate, dit-elle à Loys, la fatigue, les émotions lui seront funestes ; le médecin l’a dit, cela peut te porter malheur. »

Loys, troublé par cette confidence, rassure la bonne mère, et Giselle, prenant la main de Loys, la presse sur son cœur, et semble dire qu’avec lui, elle n’a jamais de dangers à craindre.

Des fanfares de chasse se font entendre au loin. Loys, inquiet à ce bruit, donne vivement le signal du départ pour les vendanges, et entraîne les paysannes, tandis que Giselle, forcée de rentrer dans la chaumière avec sa mère, envoie un baiser d’adieu à Loys, qui s’éloigne suivi de tout le monde.

SCÈNE VII

A peine Hilarion se voit-il seul, qu’il explique son projet ; il veut à tout prix pénétrer le secret de son rival, savoir ce qu’il est… S’assurant que personne ne peut le découvrir, il entre furtivement dans la chaumière de Loys… À ce moment,